Muhammad Bin Alawi Bin Jaafar AlShakhoori, un militant saoudien de 34 ans ayant participé au mouvement démocratique de 2011 à Qatif, a été arrêté sans mandat en 2017 à un poste de contrôle. Il a ensuite été victime de disparition forcée et de torture,ce qui lui a valu des douleurs et des blessures chroniques, puis contraint de signer des aveux. Muhammad a été condamné pour divers chefs d’accusation et envoyé à la prison de Mabahith à Riyad, où il est resté incarcéré jusqu’en 2017, puis a été transféré à la prison d’Al-Ha’ir à Riyad. Par la suite, il n’a pas été autorisé à contacter sa famille et les autorités ont refusé de leur transmettre des informations quant à son état.
Le 17 avril 2017, Muhammad a été arbitrairement arrêté à l’un des points de contrôle de fouille d’Al-Awamiyah à Al-Qatif par les forces de police de la province de l’Est, qui n’ont pas révélé le motif de l’arrestation, ni présenté de mandat d’arrêt. Après avoir disparu pendant trois jours, sa famille n’a appris qu’il avait été arrêté que lorsque tout le quartier a été encerclé par des chars et des voitures armées de mitrailleuses pour faire une descente dans la maison de Muhammad. Le raid a eu lieu en présence de Muhammad, alors que ses mains et ses jambes étaient enchaînées. Il a ensuite été emmené à la prison de Mabahith dans la province de l’Est, où il a été autorisé à recevoir sa première visite depuis environ sept ou huit mois, puis les autorités ont commencé à organiser une visite mensuelle et un contact hebdomadaire. Après son transfert à la prison de Mabahith à Riyad, il a été interrogé, interdit de recevoir des visites ou d’être en contact avec ses proches, et a disparu de force pendant trois mois. Après son transfert à la prison d’Al-Ha’ir à Riyad, il n’y a pas eu de nouvelles de lui pendant un certain temps, puis il a été autorisé à recevoir des visites régulièrement jusqu’à la propagation de la pandémie Covid-19 dans le pays. Le régime saoudien a alors profité de l’épidémie pour empêcher les visites et même les contacts pendant une période allant de 3 à 6 mois. Ensuite, les visites ont été limitées à 3 personnes seulement, à l’exclusion de ses parents, sous prétexte de leur âge avancé. La dernière visite avec sa famille a eu lieu le 15 juillet 2021.
Au cours de son enquête, Muhammad a été torturé par les autorités pénitentiaires tant dans la prison de Mabahith dans la province de l’Est que dans la prison de Mabahith à Riyad, et ce pendant une durée de six mois. Les agents l’ont battu, lui ont infligé des coups de pied et giflé le visage ainsi que la tête et des zones sensibles. Ils lui ont administré des décharges électriques, l’ont fouetté avec des fils électriques et l’ont forcé à rester debout les bras levés pendant de longues heures. À la suite de ces tortures, Muhammad a perdu ses dents et a subi des contusions et des douleurs au dos et aux côtes, ainsi qu’aux jambes, à l’estomac et aux reins. Malgré les blessures susmentionnées, l’accès à un médecin lui a été refusé pendant plus d’un an et il s’est même vu refuser des médicaments après un examen médical. Muhammad a été contraint, en raison des tortures subies, de faire des aveux qui ont ensuite été utilisés par le tribunal pour le condamner, bien que obtenus sous la contrainte. Muhammad n’a pas pu rencontrer son avocat pendant les six mois qui ont suivi son arrestation.
Le 21 février 2021, Muhammad a été condamné à la peine de mort et à près de 80 ans de prison pour avoir rejoint un « groupe terroriste armé », financé le terrorisme et des activités terroristes, attenté à la cohésion nationale en participant à des manifestations et des protestations, s’être entraîné à l’utilisation de grenades, avoir possédé des armes et avoir diffusé des documents destinés à ébranler le système public. Diverses sessions d’appel ont eu lieu, dont la dernière en date du 2 août 2021, au cours de laquelle le jugement de condamnation à mort a été confirmé. L’affaire a ausi été portée devant la Cour suprême. Muhammed a été victime de violations au droit à un procès équitable, car il n’a pas pu consulter son avocat et n’a pas eu le temps ni les moyens de se préparer au procès. Il est également important de noter que les autorités ont montré qu’elles avaient l’habitude de cibler la famille AlShakhoori, car trois membres de la famille de Muhammed risquent également d’être exécutés en raison de leur militantisme prônant le respect des droits de la population chiite en Arabie saoudite.
Le traitement de Muhammad par les autorités saoudiennes, qu’il s’agisse de son arrestation arbitraire, de sa disparition forcée, de sa torture ou du déni de son droit à un procès équitable, est contraire à la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et constitue une violation des obligations de l’Arabie saoudite au regard de traités internationaux tels que la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CAT), à laquelle elle est partie. Un tel traitement va également à l’encontre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), qui, bien que l’Arabie saoudite n’y soit pas partie, constitue le droit international coutumier.
Par conséquent, ADHRB exhorte les autorités saoudiennes à annuler la condamnation à mort de Muhammad, car elle a été prononcée à la suite d’un procès inéquitable et d’aveux forcés. En outre, ADHRB demande aux autorités saoudiennes d’enquêter sur les allégations de torture subie par Muhammad et de tenir les auteurs responsables. Enfin, ADHRB demande au gouvernement saoudien de mettre fin à la discrimination et à la persécution dont sont victimes les militants chiites des droits humains et leurs proches.